Si les vidéos comme « Julie underground » et « Nicolas dépêche-toi » inscrivaient jusqu’ici le travail de Julie C. Fortier dans le genre de la performance filmée, ses récentes œuvres et dispositifs, affranchis du caractère performatif au sens de l’exploit, ont vu peu à peu disparaître l’artiste et son corollaire de prouesses pour laisser apparaître souvent en creux des formes substitutives de temps suspendu.
« Go West Young Man ! » résonne autant comme le titre d’un film sur le Gold Rush, qu’un possible Road Movie ou encore renvoi à « Go West ! » de l’anthropologue Daniel Royot et inscrivent de facto l’ensemble de l’exposition dans une trame narrative chargée, supposons-le, de nombreux rebondissements et autres aventures. « Gold Mining River », pièce centrale, présente des pépites d’or dans deux fioles et sous vitrine. Avec la complicité de l’artiste Yann Sérandour, Julie C. Fortier a donc cherché de l’or dans la Gold Mining River, ancienne rivière aurifère située à la frontière du New
Hampshire et du Québec et exploitée jusque dans les années 1950. Le résultat de ce temps de recherche et de labeur renvoie aux attendus de la conquête de l’Ouest, entre excitation liée à l’appât du gain et résultat forcément décevant. Les oeuvres présentées pour l’exposition comportent toutes ce caractère déceptif puisque que si l’on ne peut s’arrêter de se « faire des films » ici, nous voilà suspendus à
l’avènement d’un climax que l’on attend et qui n’arrive jamais. Les œuvres de Julie nous convient à un spectacle dont nous aurions manqué l’épisode central, le nœud de l’intrigue ou aussi bien sa fin, son achèvement, immanquablement ponctué du célèbre « The End ». Le temps dès lors s’égrène, inexorablement, incertain, vidé de tout dénouement, plus proche comme le dit Julie C. Fortier d’une certaine vacuité mélancolique.