Exposition du 12 au 14 mai 2011 – Vernissage le 14 mai de 18h à 20h
à cette occasion publication d’un poster de Cristof Yvoré qui sera disponible sur place.
Le bouquet de fleurs a mauvais genre. Thème récurrent en peinture il est considéré comme facile et plat. A la fois image et bibelot, usé par de fréquentes apparitions, c’est dans cet état de spectre qu’il est récupéré. La démarche procède du réemploi d’un sujet en fin de parcours. Son inconsistance sera le point de départ des tableaux.
Le sujet est saisi dans ses grandes lignes et recomposé au plus simple. Une construction sommaire épouse une mécanique dont le processus prend l’allure d’un plan infaillible. La facilité qu’il convoque agresse et dérange. Les constructions sosies et tocardes qu’il répète deviennent des évidences, il les désœuvre, rend caduque l’idée de système et de méthode.
Cristof Yvoré accumule aussi les couches, la composition n’est pas la seule à subir la délicate épreuve du « à la limite » et du grotesque. Les peintures sont brossées avec des outils de chantier qui excluent les subtilités et favorisent une manière par recouvrement semblable à la surface des murs. Il parvient à un effet plastifié qui tend à faire disparaître la touche. Le résultat est compact, son opacité donne l’impression de quelque chose d’étanche et sans respiration comme de la toile cirée. Cette couche résineuse a pour effet de vitrifier la figure à l’instar d’un épais vernis superflu et suranné. Il y a une volonté de rajouter à ce qui est déjà complet et le plan tout entier est occupé par une chose lourde et vaine. On frôle le mauvais goût.
Dans ces tableaux, le silence et le vide côtoient l’affectif. Ces peintures fonctionnent par impact visuel et émotionnel, le regard est forcé par une composition fermée. La vacuité de ces lieux, la futilité de ces bouquets, l’hermétisme de ces façades, nous laissent sans référence et par leur peu d’intérêt laissent la place à la subjectivité et à l’introspection. Ce qui frappe d’emblée c’est la non linéarité, ces sujets apparaissent en succédanés les uns des autres, formant un parcours en pointillé. C’est l’indice d’une acceptation passagère comme si telle chose était peinte en attendant de pouvoir la remplacer.
Se disqualifier n’est évidemment pas le but. Cristof Yvoré accepte le tableau dans son statut d’objet avec toutes ses conventions, en tout cas il les souligne lourdement. Il y a comme un paradoxe dans son affinité avec ce médium, celui de rendre visible la nature inconsidérée, irrecevable voir prosaïque de la peinture. Sa pratique n’envisage pas de véhiculer des images fortes et des valeurs édifiantes, elle fait l’objet de questionnements et d’expériences qui consistent à distendre les limites. La peinture depuis longtemps instituée, digne d’estime, qui se bat pour démontrer qu’elle n’est pas en reste avec son époque n’est pas son propos. Il l’aborde simplement, sans jugement, sans rien mettre au rebut, attaché à la volupté et au plaisir qu’elle propose quelque soit son statut, son origine ou les motivations de son auteur. Un langage à part entière et le désir d’étendre une expérience esthétique à des formes fussent-elles ingrates ou controversées.
Cristof Yvoré 1967 vit et travaille à Marseille, France, représenté par la galerie Zeno X, Anvers
Déjà paru aux éditions P :
Pots, Cristof Yvoré, 20×27 cm 36 pages n&b – isbn 978-2-917768-04-4, juillet 2009, collection sec au toucher