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  • Manuela Marques
  • Aparté
  • ©Manuela Marques, Portrait 1,2009, 75 x 95 cm, c-print, courtesy Galerie Anne Barrault, Paris

    « Le travail de Manuela Marques pose une question à laquelle il ne répond pas, mais qui est la question même de la photographie : que voit‐on quand on regarde ? Et ses photos ne nous montrent rien d’autre que l’évidence de ce qu’on ne voit pas, c’est‐à‐dire le vide qui est au cœur de l’image, l’absence dont elle porte la trace. »

    A lire Christiane Vollaire, on saisi mieux le titre choisi par Manuela Marques pour cette exposition.

    Pour mieux le comprendre, et comme souvent, j’ai rouvert mon dictionnaire : «Aparté : paroles dites par un acteur en principe pour lui seul, mais afin que le spectateur les entende ». Alors effectivement ses images nous parlent en aparté. Leur langage ne nous parvient pas forcément à la première écoute, au premier regard, car tout concourt à d’abord nous faire ressentir ce vide, cette absence dont parle Christiane Vollaire. Ses cadrages souvent décalés, et dont les figures principales ‐ qu’ils soient personnages, lieux, ou objets ‐ sont présents comme pouvaient l’être les sujets de Gérard Gasiorowsky, dans un état de défection de la personne ou des choses. Le dialogue qui s’instaure alors entre le spectateur et les images fonctionne selon de drôles d’échos qui résonnent de manières inattendues. Et ces échos, ces retours sur soi, ne sont pas immédiats, mais décalés dans le temps, ou dans l’espace. Ils nous reviennent parfois longtemps après, alors que l’image aurait pu sinon nous décevoir. Et lorsque l’affinité s’instaure, il a quelque chose de violent et de silencieux, quelque chose de tenace et de léger, qui envahit celui qui se laisse séduire comme celui qui se sent repoussé.

    Dans tout le travail de Manuela Marques, c’est le temps qui est à l’œuvre, un temps de « macération » lente et précise. Macération du regard qui s’affine. Macération des images ‐dans des archives, des boites ou des disques durs ‐ qui elles aussi prennent le temps de « remonter à la surface du visible », pour être données au regard des autres. Macération douce de l’œuvre qui se compose à son propre rythme, que ce soient dans les déplacements qu’opèrent ses images fixes, ou dans la fixité de ses images en mouvement.

    Alors l’évidence et la justesse des cadrages, le choix précis des formats et la présence mesurée de la lumière, nous permettent une « communion » tacite avec ces images qui échappe au présent et au spectaculaire.

    Erick Gudimard

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