Insuffle – Rosalie Dumont-Gagné et Alexis Bellavance
Commissaire : Constance Juliette Meffre et Robin Dupuis
Le souffle est cette respiration essentielle, cet appel de l’air qui invite à ralentir, qui fait vivre aussi – détail non négligeable. À une époque – la nôtre – où le temps et le souffle se fait court, où nous courons après notre air comme s’il s’agissait d’un vent contraire, un arrêt s’impose. Présentée dans le cadre de Chroniques – Biennale des imaginaires numériques, l’exposition Insuffle réunit deux œuvres d’artistes québécois, Rosalie D. Gagné et Alexis Bellavance, membres de l’organisme montréalais Perte de Signal. Tel un intervalle spatio-temporel au cœur de la biennale, l’exposition propose deux installations qui mettent l’air au premier plan. Impalpable matière première, l’élément s’associe ici à la lumière et devient doublement intangible. Opposant une forme de résistance passive, l’air n’est-il pas l’un des derniers retranchements d’une logique consumériste marchande à laquelle presque plus rien n’échappe ? Infiltrant et traversant toute chose, l’air est cette insaisissable force qui peut à la fois porter avec grâce et détruire sans aucun compromis, éludant ainsi les écueils d’un monde ultra conventionné.
Rosalie D. Gagné présente Règne artificiel III, une installation prenant la forme d’un environnement quasi vivant, respirant au rythme d’une vie mécanique. Dévoilant une faune indéterminée – créatures aériennes ou subaquatiques – l’ensemble s’anime en surplomb : respiration régulière et lumineuse au creux d’un espace-temps suspendu. Les éléments de polythène gonflables s’y trouvent ainsi mû, mimesis de vie, délimitant par le fait même notre expérience à la fois visuelle et sonore.
Alexis Bellavance pour sa part propose une toute nouvelle création présentée en première pour l’occasion : Cordes est une intervention in situ qui se révèle au visiteur à travers un mécanisme de déplacement de l’air ambiant. L’air que devrait générer un puissant ventilateur mural se voit inversement aspiré pour être évacué avec force par une fine ouverture horizontale pratiquée dans le mur – que seule signale une vibrante lumière bleue découpant l’espace plongé dans la noirceur. Œuvre conceptuelle minimale, Cordes se contemple en lâchant prise sur le réel.
Insuffle se veut un temps disruptif à la fois dans la biennale et dans la ville : faire une pause, participer à la respiration du monde, reprendre son souffle – contourner les règles de la cadence prescrite.
Nathalie Bachand
Dans le cadre de Chroniques – Biennale des imaginaires numériques
Une production perte de signal, sur une invitation de Diffusing Digital Art, soutenue par le Conseil des Arts du Canada.
www.chronique-s.org