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  • [ANNULÉ] Romain Bertrand (historien) au Mucem
  • © Comptes de l’expédition de Magellan, au retour de la Victoria (extrait d’un document de l’Archive des Indes, Séville)

    Exposer le récit.
    Pratiques historiennes, artistiques et curatoriales

    Un séminaire des Beaux-Arts de Marseille en partenariat avec le Mucem, le Frac Provence-Alpes-Côte d’Azur et le Collège International de Philosophie.

    Une proposition de Vanessa Brito, professeure aux Beaux-Arts de Marseille et directrice de programme au Collège International de Philosophie

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    Séances 8|8 des mercredi 6 et jeudi 7 mai 2020

    jeudi 7 mai 2020 de 11h à 13h (Mucem, I2mp) :

    « Le Détail du monde » : (d)écrire, entre histoire et littérature. Rencontre avec Romain Bertrand

    Les mots nous manquent pour dire le plus banal des paysages. Vite à court de phrases, nous sommes incapables de faire le portrait d’une orée. Un pré, déjà, nous met à la peine, que grêlent l’aigremoine, le cirse et l’ancolie. Il n’en a pourtant pas toujours été ainsi. Au temps de Goethe et de Humboldt, le rêve d’une « histoire naturelle » attentive à tous les êtres, sans restriction ni distinction aucune, s’autorisait des forces combinées de la science et de la littérature pour élever la « peinture de paysage » au rang d’un savoir crucial. La galaxie et le lichen, l’enfant et le papillon voisinaient alors en paix dans un même récit. Ce n’est pas que l’homme comptait peu : c’est que tout comptait infiniment.

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    Un « retour au récit » se manifeste aujourd’hui au sein de l’histoire et affecte plus largement les sciences sociales et les arts visuels. Quelles en sont les causes ? Pourquoi chercheurs et artistes se tournent-ils vers le récit ?

    À l’ère dite de l’Anthropocène, le sentiment de vivre dans un monde usé qui semble courir à sa perte suscite la nécessité de fabriquer de nouveaux récits pour retisser des liens entre l’existant et composer de nouvelles trames spatio-temporelles susceptibles d’ouvrir des possibles non-advenus et de contester toute forme de déterminisme. Ce séminaire se propose de saisir comment artistes, historiens ou anthropologues cherchent à déployer la dimension politique du récit à travers un certain nombre de gestes et de préoccupations communes : renoncer à la position de surplomb ; interroger sa propre situation d’énonciation ; chercher à égaliser les discours et à refuser toute hiérarchie des autorités ; tenter d’élargir le récit et d’en faire une forme inconditionnelle d’accueil, un espace ouvert aux fantômes, au refoulé et à l’exclu qui prend en considération une multiplicité d’êtres et de voix nécessaires à l’ouverture d’un espace démocratique.

    S’intéresser à ces mêmes gestes nous permettra de mieux comprendre comment les sciences humaines et sociales influencent les potentialités narratives des écritures filmiques et photographiques, mais aussi comment le cinéma et l’art contemporain renouvellent l’essai et l’énonciation historique. Comment les artistes définissent-ils les enjeux des réécritures de l’histoire qu’ils proposent ? À quelles expériences artistiques et curatoriales s’ouvrent les historiens ?

    L’historiographie étant par excellence le lieu d’exposition de la fabrique du récit, nous nous intéresserons aussi bien aux rêves d’histoire de Philippe Artières qu’aux recherches sur l’histoire empêchée que mènent actuellement Romain Bertrand et Patrick Boucheron pour ouvrir le récit et raviver la force subversive de la description. Nous porterons également notre attention à des pratiques cinématographiques et photographiques expérimentales (film performatif, conférence performée, projection parlée) qui croisent différents langages et supports pour chercher leur propre forme et dispositif d’écriture. Le travail de Silvia Maglioni et Graeme Thompson, Uriel Orlow ou Filipa César, entre autres, nous permettra de saisir comment le cinéma élargi expose le récit à son propre éclatement spatial, en rejouant son caractère hétérogène, discontinu, décentré, lacunaire ou partiel.

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