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La Compagnie, lieu de création

Du mercredi au samedi de 15h à 19h. Visites de groupes sur rendez-vous

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La Compagnie est une association régie par la loi 1901 créée en 1991. En 1996, elle a ouvert les portes d’un lieu de création réhabilité par Rudy Ricciotti, au 19 rue Francis de Pressensé dans Belsunce, Marseille.

Ce que nos activités développent concerne un effet incalculable, irrécupérable, de la création contemporaine. Comment faire pour que les passants traversent nos murs fragiles, et non pas seulement tel ou tel milieu, les habitants du quartier, ou les amateurs d’art contemporain ? On tente mélange-instant-quelconque-convivialité-réflexivité. C’est dire que l’on pose d’abord l’exigence dans sa rigueur ou l’imprévisibilité dans sa légèreté, d’une rencontre avec l’art, que cela soit par des temps d’expérimentations, de créations, des productions, des résidences, des expositions, des éditions, des ateliers de pratique artistique menés par des artistes, ou des rendez-vous scolaires et extrascolaires. Nous privilégions des moments de réflexions communes, d’interrogations, d’ouvertures, de discussions, et ces points de passage sont le lieu où l’on digresse, extrapole, poétise, analyse, comme pour mieux cerner le point précis, et indiscernable, d’une action, d’un geste, d’une situation, d’une proposition.
Peu importe la nature ou le médium des pratiques (photo, vidéo, son, peinture, dessin, sculpture, installation, performance, poésie, danse, netart, etc.), quand on en attend d’abord une singularité. On voudrait aussi parler d’une préférence, qui tisse un fil invisible et non-exclusif dans notre projet, pour les tentatives qui, par des modalités diverses ou des contenus, brouillent les frontières sociales indissociables des pratiques et des savoirs (tout ce qui a trait au politique, au social, au désir, au symbolique, à la critique, jusqu’aux approches documentaires et militantes).
Si nous réussissons à alambiquer et bricoler humblement un espace de questionnement qui entr’ouvre le coeur de la cité, du monde actuel, à travers un dispositif (une association) où des frictions arrivent, où nous aurons été surpris de qui nous sommes, qui nous rencontrons, à partir de l’art, ou de la vie, dans une porosité anonyme, alors tant mieux, ce sera déjà beaucoup.

C’est à l’intérieur des apparences que gronde le réel. On a besoin d’entendre directement ce grondement intime sans cesse recouvert par une rumeur, pas tant médiatique qu’idéologique. Nous avons besoin alors de subjectivité affirmée, exposée au dehors, pour excéder l’effet des noms propres. On essaie d’en tirer toutes les conséquences, comme pour mieux saisir non seulement des enjeux, mais des répercussions invisibles, et surtout, et d’abord, un retentissement concret, ici et maintenant, en nous, car c’est l’art qui éclaire le paysage de notre époque (et non l’inverse). C’est donc une attention aux « grands riens »(1) qui nous anime.
Et si la colère montre parfois encore le bout de son nez, on n’en sera pas déstabilisé, seulement surpris qu’elle n’ait pas encore tout fait sauter, ou joyeux de cet éclat qui nous aura mis hors de nous, hors des cercles qui se referment toujours plus sur nous. L’art fait parler les liens qu’il faut souder encore, autour de l’insurveillé de l’art et de la vie. Points d’indicibles qu’il faut maintenir, soutenir, accompagner, d’une vie nouvelle. Il ne faut pas grand chose, des petits interstices ou une grande passion, ou une légère force de décentrement, un « dissensus » (2).
Notre écoute doit redoubler notre action, écouter-c’est-déjà-parler, silences et vides pour éviter d’avoir fait une chose de plus, et que cela soit un peu plus, pas beaucoup, juste autre chose, ou du moins, ne serait-ce qu’un accroc dans le réel, du réel en tant que tel.

1 – « Grands riens » : cette expression est de Muriel Modr, artiste associée à la compagnie.
2 – Sur l’art comme « dissensus », voir Jacques Rancière, « Les paradoxes de l’art politique », in Le spectateur émancipé, édition La fabrique, 2009.

Artistes présentés : Gary Hill, Dominique Petigand, Yann Beauvais, Taysir Batniji, Pedro Costa, Jean-Luc Moulene…